Je vous parle d'une belle rencontre, de celles qui font avancer et mettre des mots sur les choses. Lorsque Marion m'a contactée pour répondre à son interview, j'ai accepté avec grand plaisir.
Sur son blog Et si deux mains, elle nous interroge sur notre capacité à changer demain pour répondre aux enjeux du futur.
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Interview
Si l’on devait associer au mot minimalisme une couleur, une seule, on penserait probablement au blanc. D’ailleurs, les résultats d’une recherche d’images sur le sujet sont édifiants : des volumes épurés, des formes simples et la part belle faite aux couleurs claires ! Pourtant, l’attrait pour le blanc n’est pas une composante essentielle de cet art de vivre, mais relève d’une simple question de goût. Rien ne nous interdit de nous entourer d’objets beaux, utiles... Et hauts en couleurs ! En témoigne la jolie marque rennaise La Mousse Tache. Sous ce nom malicieux, Pauline nous propose des créations upcyclées où tissus chatoyants venus du bout du Monde se marient à merveille avec textiles chinés. Une façon pour elle de nous transmettre son envie d’ailleurs. Une façon, aussi, de nous montrer qu’acheter engagé ne signifie pas renoncer à mettre de la couleur dans sa vie :
C’est lors d’un voyage que « j’ai pris conscience de ce qui était vraiment essentiel pour moi »
Est-ce votre amour pour le(s) voyage(s) qui vous a poussée à créer La Mousse Tache ?
Oui, en partie. J’ai toujours été fascinée par les photographies de voyage, les motifs ethniques, les couleurs flamboyantes des étoffes, la beauté de l’artisanat du monde. Sur les murs de ma chambre d’adolescente, il y avait des images que j’ai admirées longuement en rêvant à ces pays lointains...
Et puis un jour, lorsque l’opportunité s’est présentée, j’ai décidé de partir en Asie. Et c’est en voyant les tonalités des saris traditionnels indiens qu’est née l’envie de créer à partir des tissus du monde.
Plus précisément, votre séjour de 4 mois en Inde il y a 5 ans a été pour vous une révélation. En quoi a-t-il changé votre perception de la vie ?
L’Inde est le pays qui m’a toujours le plus attirée, pour ses couleurs, pour la beauté de ses textiles et pour la spiritualité omniprésente. Il y a cinq ans, j’ai eu besoin de faire une coupure avec la vie telle que je l’avais toujours vécue ici et l’Inde s’est révélée être la destination idéale pour tenter de nouvelles expériences !
Ce voyage a remis en question mon rapport aux autres, à l’importance des choses, au modèle de vie occidental... et j’ai pris conscience de ce qui était vraiment essentiel pour moi.
Des créations upcyclées pour allier création et éco responsabilité
A côté des tissus ethniques dont vous raffolez, vous utilisez des textiles chinés ici et là que vous revalorisez. L’upcycling est-il une composante essentielle de votre démarche, et, plus globalement, de votre philosophie de vie ?
Dans notre société qui va à toute vitesse, les matières et ressources naturelles sont utilisées et gaspillées, comme si cela n’avait aucune valeur. Le monde de la mode en est une mauvaise illustration et cela va à l’encontre de ma façon de voir les choses. Quand j’ai créé ma marque, il était essentiel d’essayer de faire les choses différemment, à ma petite échelle.
Le but était de trouver un concept me permettant d’allier création et éco responsabilité. C’est pourquoi presque chacune de mes créations intègre d’anciens textiles de manière visible ou invisible. Par ailleurs, mes patrons sont optimisés afin que les coupes de tissus ne génèrent que très peu de chutes. Ces dernières seront ensuite utilisées en patchwork ou en rembourrage.
Pour remplir vos créations qui nécessitent de l’être (bouillottes, coussins), vous vous servez de matières premières telles que les graines de lin, chutes de tissus...). En quoi cela participe-t-il de votre démarche éco responsable ?
L’autre composante de ma démarche est d’utiliser au maximum des matières naturelles : coton ou lin pour mes créations et papier kraft pour les packagings, mais jamais de plastique !
Pour les articles de bien-être, j’emploie des graines de lin, plante peu énergivore à produire et qui pousse en France, dont les propriétés relaxantes et apaisantes sont idéales pour mes bouillottes sèches. Ce matériau est durable, sans produits chimiques et écologique.
Le coton n’étant pas un bon élève puisque sa culture est gourmande en eau et en pesticides, je le recycle au maximum. Lorsque les chutes de tissus sont vraiment trop petites pour être incluses dans les patchworks, je les conserve pour remplir des coussins. Grâce à cette technique, je ne jette jamais de tissus. Et cela me permet de me rapprocher de l’objectif zéro déchet ou presque que je me suis fixé.
Le patchwork comme moyen d’allier envie d’ailleurs et démarche éco responsable
Vous réalisez beaucoup de patchworks. Est-ce pour vous la technique idéale pour marier inspirations ethniques et démarche éco responsable ?
Toutes mes petites chutes de tissus sont classées par couleurs dans des tiroirs, dans l’attente d’être réutilisées. Quand commence la phase de création, c’est le morceau de tissu que j’ai sous la main qui va déterminer la composition du patchwork. Cette contrainte me permet d’optimiser les chutes et, encore une fois, de jeter au minimum. D’autre part, l’objectif esthétique du patchwork est d’harmoniser les couleurs en associant différents styles de motifs pour former une mosaïque aux multiples influences.
Cela rejoint-il l’idée de métissage chère à votre cœur, chacune de vos créations étant un condensé d’inspirations ethniques diverses (modèles aux formes japonisantes, tissus africains, indiens...) ?
J’aime l’idée qu’on puisse s’inspirer du savoir-faire d’un pays en le réinterprétant avec les tissus traditionnels d’une autre culture comme pour mes sacs origami en wax où la technique empruntée aux pliages de papiers japonais et les motifs africains fusionnent.
L’été dernier, j’ai rapporté des batiks indonésiens et des tissus traditionnels birmans de mon voyage en Asie. Les motifs et les couleurs sont fascinants ! Nouvelles destinations, nouvelles inspirations ! Je rêve déjà au prochain voyage...